La nouvelle version du véhicule d'investissement à long terme de l'UE présente de réelles avancées.

Points clés

  • L’ELTIF 2.0 offre une plus grande diversité d'actifs et une meilleure accessibilité. Il permet aux investisseurs particuliers d’accéder pour la première fois à grande échelle aux marchés privés.
  • L'implication du secteur de la gestion d’actifs dans la refonte de ce véhicule a joué un rôle important dans les améliorations apportées à l’ELTIF 2.0 et dans son utilisation.
  • Le secteur de la gestion d’actifs devra rester proactif pour s'assurer que les questions techniques encore en suspens soient levées.
Ceux qui ont une bonne mémoire se souviennent peut-être du fonds d'investissement européen à long terme (European Long-Term Investment Fund, ou ELTIF).

Conçu pour encourager l'investissement dans l'économie réelle dans toute l'Union européenne et lancé en grande pompe il y a environ neuf ans, ce type de véhicule n'a pas connu le succès escompté et a rapidement disparu des esprits.

Près d'une décennie plus tard, la nouvelle version améliorée, baptisée ELTIF 2.0, est prête à assurer les missions que son prédécesseur n'avait pu réaliser. L’ELTIF 2.0 offre aux investisseurs une plus grande diversité d'actifs et une meilleure accessibilité. Cette structure permet en outre aux investisseurs particuliers d’accéder pour la première fois à grande échelle aux marchés privés.

Le secteur de la gestion d’actifs est cette fois-ci convaincu que ce véhicule connaîtra le succès attendu : le nombre d'ELTIFs enregistrés a presque doublé, passant de 50 à plus de 90 en l'espace d'un an, et davantage de fonds sont sur le point d’être lancés pour capter de probables flux de capitaux.

Qu'est-il advenu de l’ELTIF 1.0 ?

Les ELTIFs sont entrés en vigueur en décembre 2015, dans le but de financer l'économie réelle en fléchant des capitaux non bancaires vers des projets d'infrastructure à long terme et des PME. Les ELTIFs ne constituent pas vraiment une nouvelle structure juridique. Il s’agit plutôt de fonds d'investissement alternatif européens (AIF) assortis d’un label long terme (d’où « ELTIF »).

Après leur lancement, seulement 2,4 milliards d'euros avaient été levés et les fonds n'étaient domiciliés que dans quatre pays. Cette lenteur s'explique principalement par les restrictions imposées à leur utilisation par différents pays, ce qui a rendu les ELTIFs insuffisamment flexibles et globalement très compliqués à mettre en œuvre.
En particulier, le ticket d’entrée minimum d'environ 10 000 euros pour les petits investisseurs a largement empêché la démocratisation des marchés privés.

La décision a donc été prise de recalibrer le concept d'ELTIF.

« Les besoins d'investissement en Europe sont énormes pour les actifs réels, les projets durables et numériques, ainsi que pour aider les entreprises à changer d’échelle », déclare Anne Macey, Global Head of Public Affairs chez Natixis Investment Managers. « Sans un véhicule à long terme à l'échelle de l'UE, il est probable que les jeunes entreprises iront aux États-Unis pour financer leur croissance. Les investisseurs ont clairement indiqué qu'ils engageraient des capitaux si les caractéristiques du produit étaient modifiées. C'est désormais chose faite. »

Modifications apportées sur l'éligibilité des actifs

Le résultat ? L’ELTIF 2.0, est entré en vigueur en janvier 2024.

L'ELTIF 2.0 est réapparu sous la forme d'un produit plus souple s’agissant des actifs éligibles, des ratios d’emprunt et des règles de concentration ainsi que de diversification. Cette nouvelle version a également amélioré l'accès des investisseurs, notamment du grand public.

Concernant les actifs éligibles, le champ d'action a été considérablement étendu. La définition des actifs réels a été simplifiée et élargie. Les gérants peuvent désormais investir dans des obligations vertes et des fintechs. La capitalisation de marché des sociétés cotées éligibles a été portée de 500 millions à 1,5 milliard d'euros. Les titrisations simples, transparentes et standardisées (STS) sont également éligibles sous certaines conditions. L'exigence de localisation dans l'UE pour les actifs éligibles a été supprimée.

Autre caractéristique essentielle, l'ELTIF 2.0 offre désormais une plus grande flexibilité en matière de composition et de diversification du portefeuille, avec par exemple une poche d'investissements liquides pouvant aller jusqu'à 45 % de l’actif.

La démocratisation prochaine des marchés privés

L'évolution la plus significative de l'ELTIF réside peut-être dans la démocratisation des actifs privés. Le seuil gênant de 10 000 euros a été écarté, de même que la limite de 10 % d'exposition à des actifs réels pour les investisseurs disposant de moins de 500 000 euros d’épargne.

« La suppression de ce seuil change la donne », déclare Anne Macey. « Les investisseurs particuliers peuvent désormais investir sans pour autant disposer d’un capital, tout en continuant de bénéficier d'une solide protection. » L’ELTIF 2.0 est en effet conforme aux principes de protection des investisseurs établis par MiFiD II. Et Anne Macey d’ajouter : « Le fait que les investisseurs particuliers comprennent parfaitement qu'il s'agit d'investissements à long terme constitue une protection en soi. »

Le plafond d'emprunt de 30 % de la valeur en capital d'un ELTIF a été relevé à 50 % pour les ELTIFs ouverts aux investisseurs particuliers, ce qui est de nature à améliorer la performance financière. Ce plafond passe même à 100 % pour les investisseurs professionnels.

L'ELTIF 2.0 autorise également les structures de fonds de fonds, qui peuvent investir dans d'autres fonds alternatifs de type AIF. Cela permettra aux investisseurs particuliers d'accéder indirectement à des fonds qui étaient auparavant réservés aux professionnels ou qui n'étaient pas tout simplement pas disponibles.

Un dernier obstacle sur la route

La plupart des obstacles ayant été largement levés, les ELTIFs bénéficient désormais d'une certaine dynamique. Il reste cependant un ou deux obstacles sur la route, notamment la procédure de rachat qui rend la gestion du passif compliquée pour les ELTIFs à capital variable. Les ELTIFs devraient imposer un délai de préavis minimum de 12 mois. En outre, les ELTIFs à capital variable qui souhaitent appliquer un délai de préavis plus court devront détenir jusqu'à 40 % de leur actif en liquidités ou quasi-liquidités.

Ce « standard », élaborée par l'ESMA, est actuellement examinée par la Commission européenne. « En tant que représentants de l'industrie, nous sommes en train de travailler afin que les normes techniques ne compromettent pas l'objectif principal de l’ELTIF 2.0 », déclare Anne Macey.

Le 6 mars 2024, la Commission a modifié le standard, incluant l’obligation d’informer les autorités nationales avant que des modifications importantes ne soient apportées aux politiques de rachat et supprimant l’exigence d’un préavis minimum de 12 mois. L’ESMA examine actuellement le standard modifié et doit maintenant revenir à la Commission avec son approbation ou une nouvelle copie amendée.

Pourquoi le processus ELTIF est-il meilleur cette fois-ci ?

L'implication accrue du secteur de la gestion d’actifs dans la refonte de ce véhicule a joué un rôle important dans les améliorations apportées à l’ELTIF 2.0 et dans son utilisation.

« La plupart des décideurs européens sont cette fois vraiment à l'écoute du secteur », précise Anne Macey, qui a joué un rôle de conseiller dans le développement de l'ELTIF 2.0. « C'est une excellente chose, car en tant qu'industrie, nous connaissons les besoins des investisseurs et sommes à même de concevoir et développer un produit qui les séduira. »

Anne Macey et ses collègues de Natixis Investment Managers ont activement échangé avec les ministères des finances européens et la Commission. Ils se sont entretenus avec des experts de premier plan, notamment le rapporteur du Parlement européen et son équipe, ainsi qu'avec des régulateurs et des responsables financiers d'autres États membres de l'Union européenne. Elle apporte à ce titre l’éclairage suivant : « Nous échangeons nos points de vue, écoutons leurs préoccupations et tirons parti de l'expertise opérationnelle de Natixis et de son vaste réseau d'affiliés couvrant toutes les capacités clés en matière d'actifs privés pour contribuer à l'élaboration du cadre européen. »

Les références d’Anne Macey font d'elle une candidate naturelle pour participer à l'élaboration du nouvel ELTIF. À un poste précédent, en tant que directrice générale du « think tank » européen Confrontations Europe, Anne Macey, son équipe et les membres fondateurs avaient travaillé aux côtés du commissaire européen Michel Barnier pour redonner de l’élan à l'investissement à long terme, notamment au travers de l'ELTIF en tant qu'élément prioritaire de l'agenda de l'UE.

En tant qu'ancienne directrice de cabinet du rapporteur général du budget à l'Assemblée nationale française, elle comprend la façon dont le secteur privé doit positionner son message pour être bien compris et pour que ses idées soient intégrées dans la prise de décision politique. Le meilleur moyen, et le plus efficace, est en fait de partager la même vision et de tirer parti de l'expertise opérationnelle des experts de premier plan du secteur privé pour la faire aboutir.

Le secteur doit rester proactif

Le secteur de la gestion d’actifs devra rester proactif pour s'assurer que les questions techniques encore en suspens soient levées. « Nous pensons que la Commission européenne pourrait bien accomplir ce qu'elle a rarement fait auparavant, à savoir la modification de normes techniques », déclare Anne Macey. « Cela couronnerait de succès les efforts de dialogue de l'industrie au cours des deux dernières années. »

Anne Macey souhaiterait que la Commission aille encore plus loin à l'avenir en proposant des incitations fiscales pour les investissements dans les ELTIFs, à l'image des avantages fiscaux offerts aux États-Unis pour des véhicules similaires, tels que les Business Development Corporations par exemple.

« Il est vrai qu'il existe des contraintes en matière de finances publiques dans l'UE, mais si nous voulons que le secteur privé contribue au financement de l'économie réelle, il faut comprendre que les incitations fiscales peuvent profiter à tout le monde, y compris aux États », déclare Anne Macey. « Les incitations fiscales pourraient permettre de flécher les capitaux à long terme vers l'économie réelle, en facilitant la construction d'infrastructures d'énergie renouvelable, d'écoles, d'hôpitaux, ainsi que la consolidation de PME. »

« Cela permettrait de créer des emplois et d'améliorer les conditions de vie dans l'ensemble de l'UE ».


Publié en mars 2024
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