Partout dans le monde, les villes doivent s’adapter à l’urbanisation, au vieillissement de la population et au changement climatique. Les solutions passent à la fois par des changements dans les politiques publiques et par des investissements privés novateurs.

Selon l’Observatoire européen Copernicus1, le mois de juillet 2023 a connu la température moyenne la plus élevée depuis 120 000 ans. Le réchauffement climatique aggrave les phénomènes extrêmes tels que les sécheresses, les incendies, les vagues de chaleur et les inondations, tant en durée, en intensité qu’en fréquence. Par ailleurs, la vulnérabilité à ces phénomènes se fait le plus ressentir dans les villes, où vit 55 % de la population mondiale2.

En effet, les matériaux utilisés dans la construction de nombreuses villes sont hélas particulièrement susceptibles d’absorber la chaleur du soleil en cas de canicule, ce qui les transforme en « îlots de chaleur » et entraîne une hausse de la température et de la pollution de l’air. La pollution et la canicule tuent, comme le résume le sociologue américain Eric Klinenberg, spécialiste de l’impact social des canicules : « Les canicules sont des tueuses silencieuses et invisibles des personnes silencieuses et invisibles, en particulier les plus âgées et les plus fragiles.3»

Des chercheurs du département des sciences des systèmes environnementaux de Zurich, en Suisse, ont calculé que 22 % des 500 plus grandes villes du monde connaîtront en 2050 des conditions jusqu’à présent inconnues. Des températures plus élevées et des précipitations plus faibles pourraient constituer la nouvelle norme pour les villes d’Asie du Sud-Est, par exemple4.

Ainsi, Manille, la capitale des Philippines, enregistrera une température moyenne supérieure de près de 4 °C en été, mais connaîtra également 8 % de précipitations en moins au cours d’une année moyenne. L’étude menée par PLOS-One prévoit ainsi que le climat de Madrid en 2050 sera similaire à celui de Marrakech aujourd’hui, tandis que le climat de Londres ressemblera davantage à celui de Barcelone actuellement5.

Les transports et les bâtiments au sein de ces zones urbaines, que ce soit de l’immobilier résidentiel, commercial ou industriel, produisent près de 75 % des émissions mondiales de CO2 et ont un impact majeur sur l’environnement6. Cela explique pourquoi les villes les plus avancées dans la lutte contre le réchauffement climatique développent des outils de planification et mettent en place des mesures d’atténuation et d’adaptation.

Bien entendu, ces mesures ont un coût. Cependant, le coût de l’adaptation est encore bien inférieur au coût présumé de l’inaction climatique et des réparations, qui pourrait laminer l’économie7.

La finance a ainsi clairement un rôle à jouer pour aider les villes à atténuer les effets du changement climatique et à s’y adapter. Les exemples suivants illustrent trois types d’investissements qui ont pour but d’apporter des changements :

Le secteur du bâtiment, responsable de 40 % de la consommation d’énergie en Europe, est un gouffre énergétique8. Repenser les bâtiments, qu’ils soient neufs ou anciens, est indispensable pour atteindre la neutralité carbone. En effet, les émissions de gaz à effet de serre provenant des bâtiments représentent 36 % du total des émissions de l’UE8.

La rénovation est une question prioritaire pour les villes dotées de bâtiments publics tels que les écoles, les hôpitaux, les universités et les logements sociaux. Avec l’inflation et la flambée des prix de l’énergie, les personnes y vivant peuvent se retrouver dans une situation de précarité financière et énergétique.

Néanmoins, des solutions pratiques existent. Par exemple, pour limiter les températures intérieures excessives pendant les vagues de chaleur et limiter l’utilisation de la climatisation dans la mesure du possible, les bureaux ou les entrepôts peuvent recourir à la surventilation nocturne. Cette technique passive capte l’air extérieur plus frais la nuit et l’insuffle à l’intérieur pour réduire la température intérieure.

Thierry Laquitaine, directeur ISR chez AEW, spécialiste de l’investissement immobilier, explique : « Associée à une meilleure isolation évitant la surconsommation en hiver et l’utilisation de la climatisation en été, la surventilation pourrait contribuer à limiter la consommation énergétique ».

Il existe un risque physique des changements climatiques sur les actifs immobiliers, et AEW intègre systématiquement l’analyse du risque climatique dans ses portefeuilles depuis 2020. Par exemple, il arrive que des bâtiments soient inondés en raison de précipitations excessives. Dans ce cas, l’installation de clapets anti-retour peut empêcher l’intrusion de l’eau dans les habitations en bloquant le reflux des eaux usées au niveau des toilettes ou des éviers.

Les risques liés au climat comprennent également l’affaissement des sols argileux. Si l’argile est soumise à des sécheresses et des inondations fréquentes, celle-ci se dilate et se contracte, endommageant les fondations et la structure des bâtiments. Une équipe d’AEW se consacre à la gestion des facteurs ESG de son portefeuille et applique l’analyse de ces facteurs à toutes les étapes du projet immobilier, que ce soit lors de l’acquisition, de la construction ou de la rénovation.

Thierry Laquitaine ajoute : « Nous avons développé notre propre processus d’évaluation pour cartographier avec précision les risques climatiques auxquels nos actifs sont exposés. Nous pouvons ainsi évaluer leur vulnérabilité et mettre en œuvre un plan d’action approprié. »

« Pour qu’un plan d’action soit efficace, il faut que toutes les équipes d’AEW soient impliquées, notamment les équipes d’investissement et de gestion d’actifs, ainsi que les services techniques. Nous organisons des formations approfondies pour nos équipes dans différents pays. Tout le monde doit avoir des connaissances suffisantes pour avoir les bons réflexes face aux risques climatiques ».

De plus, la lutte contre les changements climatiques implique une évolution constante. « Il ne s’agit pas d’un projet ponctuel », poursuit Thierry Laquitaine. « Nos données, nos analyses et nos outils doivent être régulièrement mis à jour. Les scientifiques se penchent sur ce domaine d’expertise et les connaissances sur les changements climatiques s’améliorent rapidement. Nous devons tous adapter nos connaissances et suivre le rythme de ces changements ».
Contrairement aux obligations traditionnelles, les obligations vertes recherchent un bénéfice environnemental. Celles-ci constituent l’un des leviers dont disposent les collectivités locales pour financer la transition des systèmes de production et de consommation d’énergies fossiles vers des sources d’énergie renouvelables.

La stratégie ambitieuse de l’Union européenne en matière de réduction des gaz à effet de serre (- 55 % d’ici à 2030 et une neutralité carbone d’ici à 2050) favorise l’émission d’obligations vertes afin de soutenir l’électrification des transports, le développement des énergies renouvelables et l’amélioration de la performance énergétique des bâtiments9.

Quant aux obligations durables, dont le périmètre est plus large que celui des obligations vertes, celles-ci ont représenté 15 % du total des émissions obligataires primaires dans le monde en 202310. Afin de financer les politiques locales de transition, les collectivités locales ont rejoint les rangs des émetteurs d’obligations vertes, un marché initialement dominé par les États souverains, les institutions supranationales et les organismes.

Les villes soutiennent la mobilité douce, comme le vélo, la marche à pied, les trottinettes et les transports publics, afin de réduire la pollution urbaine. À Paris, par exemple, le Grand Paris Express vise à étendre les lignes de métro dans la région parisienne d’ici à 203011.

Ce projet est financé en partie au moyen d’obligations vertes souscrites par le spécialiste de l’investissement durable Mirova, qui veille à ce que l’argent versé soit bien fléché vers le Grand Paris Express conformément aux Green Bond Principles. La traçabilité et la transparence d’un tel projet d’obligations vertes réduisent le risque de « greenwashing ».

Marc Briand, co-responsable de la gestion obligataire chez Mirova, indique : « Les obligations vertes sont un excellent moyen pour les investisseurs d’avoir de la transparence sur leur portefeuille, afin de voir de quelle manière leur argent est investi dans une perspective d’impact ESG. De plus, nous portons une attention particulière à la précision et la transparence des rapports d’impact annuels fournis pour chaque projet envisagé.

« L’emprunt obligataire de la Société du Grand Paris financera la construction de quatre nouvelles lignes de métro automatique sur environ 200 km et l’extension des lignes existantes, ainsi que la construction et l’aménagement de 68 nouvelles gares et 7 centres techniques. Le projet devrait concerner deux millions de passagers par jour et entraîner la création de 15 000 emplois directs par an12 ».
Pour atténuer les changements climatiques, il faut commencer par résoudre les problèmes d’émissions actuels et orienter les investisseurs vers des projets écologiques par nature. Toutefois, la création d’un avenir durable ne peut se faire sans certains efforts de transition importants.

Le secteur des infrastructures a souvent été critiqué pour sa consommation de matériaux qui semble inextinguible et ses émissions de gaz à effet de serre13, mais ce secteur est essentiel à nos activités sociétales quotidiennes et convient donc parfaitement à l’innovation et à l’adaptation.

Vauban Infrastructure Partners estime que les infrastructures doivent s’engager dans une révolution et passer d’un modèle linéaire à un modèle circulaire. Afin de soutenir cet engagement, Vauban est entré au capital d’Indigo, un leader du stationnement et de la mobilité individuelle qui fait évoluer sa stratégie commerciale pour proposer des bornes de recharge pour véhicules électriques et des vélos en libre-service dans ses parkings, et s’associe également à des acteurs de la logistique du dernier kilomètre14.

Mounir Corm, directeur général délégué et associé fondateur de Vauban Infrastructure Partners, explique : « Des solutions au changement climatique sont en train d’émerger. La capacité à les développer à grande échelle sera la clé de la réussite. Avec 80 % de la population mondiale concentrée dans les zones urbaines en 2050, les villes où les infrastructures sont interconnectées auront un rôle central à jouer : celui d’incuber la révolution circulaire rapidement ».
Qu’il s’agisse de transformation des bâtiments, de la mobilité ou des infrastructures indispensables à la transition durable, de nombreux leviers sont disponibles pour permettre l’atténuation et l’adaptation des villes à certains des pires impacts du changement climatique. De plus, les politiques publiques impliquent un coût qui nécessite parfois un partenariat avec le secteur privé, dans un contexte de haut niveau d’endettement public et de taux d’intérêt élevés.

Par exemple, les approches innovantes de la finance mixte s’appuient sur les financements publics ou le soutien de l’État pour encourager les investissements privés, ce qui permet de financer des projets ou des activités qui, dans des circonstances normales, seraient considérés comme « non investissables ». La puissance publique fournit effectivement un filet de sécurité, ses co-investissements et ses garanties déverrouillent l’investissement privé en réduisant le risque ou en améliorant la rentabilité et, à bien des égards, transforment le « non investissable » en « investissable ».

La mise en commun des ressources offre des possibilités d’investissement supplémentaires à grande échelle. Plus important encore, l’argent est fléché vers les domaines qui en ont le plus besoin, qu’il s’agisse de contribuer à la lutte contre le changement climatique et la perte de biodiversité, ou de créer des moyens de subsistance plus convenables et plus durables pour les communautés locales.

Concernant l’aide apportée aux villes pour gérer les changements climatiques aujourd’hui et à l’avenir, toutes les perspectives financières permettant de progresser doivent être soigneusement étudiées.

AEW, Mirova et Vauban Infrastructure Partners sont des sociétés affiliées de Natixis Investment Managers et font partie de notre Collectif d’experts
1 Le Monde https://www.lemonde.fr/planete/article/2023/09/06/l-ete-2023-a-ete-le-plus-chaud-jamais-mesure-dans-le-monde-selon-l-observatoire-europeen-coperni-cusl-effondrement-aommence-affirme-le-secretaire-general-des-nations-unies_6188057_3244.html
2 En 2018. (de 30 % en 1950 à 55 % en 2018, 2050 devrait atteindre 70 % d’urbanisation). ONU, « 68 % de la population mondiale devrait vivre dans des zones urbaines d’ici à 2050, selon l’ONU ».
3 Philosophie magazine, July 2022, https://www.philomag.com/articles/eric-klinenberg-les-canicules-sont-des-tueuses-silencieuses-et-invisibles-de-personnes
4 https://www.weforum.org/agenda/2022/06/climate-change-cities-experience-climate-extremes/
5 https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0217592
6 PNUE, Changements climatiques dans les villes
7 https://www.un.org/en/climatechange/thought-leaders-simon-stiell
8 https://commission.europa.eu/news/focus-energy-efficiency-buildings-2020-02-17_en
9 Tel que défini dans les Green ond Principles https://www.icmagroup.org/assets/documents/Sustainable-finance/2022-updates/Green-Bond-Principles-June-2022-060623.pdf
10 Mirova/Bloomberg
11 https://www.grandparisexpress.fr/gpe-essentiel
12 Mirova Research
13 63 % de la consommation mondiale de matériaux et 79 % des gaz à effet de serre
14 Vauban, « Investir dans un secteur essentiel pour une économie circulaire »,https://www.im.natixis.com/en-institutional/insights/vauban-infrastructure-partners-car-park-management-strategy

La mise à disposition de ce document et/ou les références à des titres, secteurs ou marchés spécifiques dans ce document, ne constituent pas des conseils ou des recommandations en investissement, ni une offre d’achat ou de vente d’un titre, ni une offre d’une activité financière réglementée. Les investisseurs doivent dûment tenir compte des objectifs d’investissement, des risques et des dépenses de tout investissement avant d’investir. Les analyses, opinions, et certains des thèmes et processus d’investissement contenus dans le présent document reflètent uniquement les opinions du ou des gestionnaire(s) de portefeuille à la date indiquée. Ces informations, de même que la composition du portefeuille et les caractéristiques indiquées, sont susceptibles de changer. Rien ne garantit que les évolutions seront conformes aux prévisions du présent document. Les analyses et opinions exprimées par des tiers externes sont indépendantes et ne reflètent pas nécessairement celles de Natixis Investment Managers. Les informations concernant les performances passées ne garantissent en aucun cas les résultats futurs

DR-62595