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Les changements majeurs qui façonnent le paysage de l'investissement aujourd'hui. Les tendances qui continueront d’influencer la réflexion des investisseurs au cours des dix prochaines années.
Obligations

Pourquoi l'inflation et la qualité du crédit restent des préoccupations majeures.

juillet 15, 2025 - 7 min

En septembre 2024, François Collet, Deputy Fixed Income CIO chez DNCA à Paris, nous a dit qu'il surveillait de près l'inflation, la volatilité des marchés, la possibilité d'une erreur de la banque centrale et la crainte que les déficits budgétaires ne soient plus importants que prévu. Beaucoup de choses se sont passées depuis. Mais le pic de volatilité de cette année a-t-il modifié les idées reçues sur l'investissement à revenu fixe ?

Dans ces questions-réponses, François Collet répond à des questions basées sur certaines des réponses à notre récente enquête auprès des investisseurs individuels1, afin de voir si les attentes des investisseurs s'alignent sur les perceptions de nos experts concernant les marchés des titres à revenu fixe.

 

Avec 70 % des investisseurs interrogés déclarant que le monde semble instable et qu'ils sont inquiets pour leurs finances, de nombreux investisseurs semblent perdus - en effet, près d'un quart (23 %) des personnes interrogées disent qu'elles ne savent pas quoi faire. Que diriez-vous pour convaincre les investisseurs de rester investis ?

Sur le long terme, être exposé en cash, c'est la pire chose qu’un investisseur puisse faire puisque les rendements réels sur longue période sont négatifs. Que ce soit en Europe ou aux Etats-Unis, un investisseur qui serait resté exposé en cash depuis plus de deux décennies obtiendrait un rendement net négatif, une fois l’inflation prise en compte. La meilleure manière d'être sûr de perdre de l'argent, c'est d'investir sur du cash. Le cash n'est pas une solution satisfaisante, en tout cas pas sur le moyen-long terme.

 

Les prévisions de rendement à long terme sont passées de 12,8 % au-dessus de l'inflation en 2023 à 10,7 % au-dessus de l'inflation, mais même des prévisions modérées présentent encore un risque important. Trouvez-vous plus d'opportunités dans un domaine de la classe d'actifs à revenu fixe que dans un autre ? Quels sont les secteurs que vous évitez en ce moment ?

Même sur les actions, des rendements à deux chiffres seront difficiles à atteindre. Dans l’obligataire, un rendement à deux chiffres ne peut être qu’exceptionnel, peut-être avec une Fed baissant une année massivement ses taux directeurs mais cette performance hors norme serait la garantie de rendements futurs plus faibles.

Nous sommes dans un cycle de baisse de taux d'intérêt de la part des banques centrales, une période où les déficits publics sont très élevés. On privilégie donc des positions longues sur le marché obligataire, en se concentrant sur la partie intermédiaire de courbe, de 5 ans à 10 ans, en évitant les parties très longues (20-30 ans) liées au déficit public dans la plupart des pays.

On préfère l’allocation en dette souveraine émergente de qualité Investment Grade. Des pays comme le Chili, la Pologne ou la Hongrie affichent des ratios d'endettement inférieurs à ceux des pays développés, offrent une visibilité sur la dette assez bonne et présentent des niveaux de spreads assez largement positifs versus les pays développés. Sur des maturités entre 5 et 10 ans, la rémunération offerte par ces pays compense largement le risque pris.

On évite pour l’instant la partie longue de la dette souveraine tant que la situation des comptes publics ne s’est pas améliorée.

 

Que pensez-vous du fait que 43 % des investisseurs s'inquiètent du risque d'effondrement de l'économie, tandis que 41 % sont préoccupés par la perspective d'un krach boursier ?

Je crois davantage à la possibilité d’un ralentissement économique qu’à un vrai krach économique. Je crois assez peu à une récession similaire à celle qu'on a connue après la bulle internet, en 2008 ou en 2020 parce que les niveaux d'endettement du secteur privé sont faibles.

Pour autant, on ne peut pas exclure un ralentissement ou une récession de courte durée. L’Allemagne connaît depuis 2 ans une petite récession. Malgré cela, le marché boursier allemand se tient bien, le taux de chômage a certes remonté un petit peu mais la situation économique n’est pas catastrophique. La situation sur les marchés est même plutôt bonne.

Quant au risque de krach sur les marchés, plus il y a d'investisseurs qui s'en préoccupent, et moins il y a de chances qu'il advienne. Le fait que des gens soient inquiets est plutôt un bon signe. Le jour où tout le monde sera euphorique et personne ne pensera que les marchés peuvent baisser, c'est sans doute à ce moment-là qu'il faudra réduire un peu la voilure. Pour l'instant, pour nous, il n’y a pas de pas de sujet majeur.

 

Même si l'inflation se rapproche des objectifs des banques centrales, rares sont ceux qui pensent qu'elle est réellement maîtrisée. À l'échelle mondiale, seuls 41 % des investisseurs pensent que l'inflation élevée est enfin dans le rétroviseur. Quel est votre point de vue sur l'inflation ? Y a-t-il d'autres risques qui vous semblent plus urgents pour les investisseurs à revenu fixe ?

Les deux principaux risques qui pèsent sur l’investisseur sont le défaut, c’est-à-dire le risque de ne pas être remboursé, et l’inflation.

Les taux de défaut des entreprises sont faibles et devraient le rester malgré le ralentissement de la croissance. Les niveaux d'endettement dans le secteur privé sont tout à fait maîtrisés. Côté souverain, la faillite de l'État américain est très improbable compte tenu de son excellente qualité de crédit.

En revanche, une dégradation de la qualité de crédit de l’Etat américain se traduirait par une dépréciation du dollar et donc plus d’inflation aux Etats-Unis. L’inflation est le second risque le plus important pour les investisseurs obligataires et les investisseurs individuels ont raison de penser qu’il peut rester. La vague inflationniste [qui a commencé en 2021] est en très grande partie derrière nous. Néanmoins, les niveaux de déficit actuels font courir le risque d’une seconde vague d'inflation au cours des prochaines années.

 

Alors que le S&P 500 a continué d'établir de nouveaux records en 2024, les inquiétudes concernant la force du commerce de l'IA, combinées à la colère de Trump sur les tarifs douaniers, ont conduit de nombreuses personnes à remettre en question leur exposition aux actions américaines, convaincues que la voie à suivre pour les actions américaines sera probablement remplie d'une plus grande volatilité et d'une plus grande dispersion. Mais qu'en pensez-vous : l'ère de l'exceptionnalisme américain est-elle vraiment révolue ? Et si c'est le cas, pourrions-nous assister à une nouvelle période d'exceptionnalisme européen ?

L'exceptionnalisme américain est surtout un exceptionnalisme du marché boursier américain, plus que de la croissance américaine.

La performance des actions américaines est bien supérieure à celle des autres places boursières. C'est principalement le fait des valeurs technologiques, dont la puissance gigantesque est comparable à celle des Etats.

Quand on parle d'exceptionnalisme américain en ce qui concerne la croissance, je pense qu'on se trompe un petit peu. La croissance économique aux Etats-Unis est certes supérieure à celle de l’Europe ou du Japon évidemment. Mais je pense que cette croissance est en grande partie liée aux politiques migratoires mises en place sous l'administration Biden et aux 16 millions d'immigrés au cours du mandat de Biden qui ont dopé la population active et la croissance potentielle de court terme. Le retour à des politiques migratoires beaucoup plus restrictives devrait freiner la croissance. Je pense que le différentiel de croissance entre les Etats-Unis et la zone euro depuis la pandémie s'explique beaucoup plus par ces différences de rythme de croissance de la population active que par un fort dynamisme du consommateur américain ou par des politiques publiques qui ont été plus efficientes là-bas.

Un ralentissement de la croissance aux Etats-Unis ne se traduira pas mécaniquement par plus de croissance en zone euro. C’est même une mauvaise nouvelle pour les Européens. Les marchés boursiers européens sont sans doute un peu en retard par rapport à Wall street, laissant espérer un rattrapage, mais le potentiel est modéré. La baisse du dollar – qui pousse l’euro à la hausse - et le ralentissement du marché américain impactent négativement les profits des grande entreprises européennes. Ces dernières qui exportent aux Etats-Unis sont pénalisée par l’effet de change. La désaffection des investisseurs pour les actions américaines, si elle se traduit par une dépréciation du dollar, n’est pas forcément une bonne nouvelle pour l’Europe.

 

Le statut du dollar en tant que monnaie de référence et des bons du Trésor américain en tant que valeur refuge est-il remis en question ?

Le statut du dollar en tant qu’actif sans risque est remis en cause, mais pas celui des bons du Trésor américain. Même si les investisseurs remettent en question le statut du dollar comme valeur refuge, le dollar reste et restera selon moi une monnaie de référence, au moins dans les 5 à 10 prochaines années.

Qui pourrait prendre sa place ? Je ne crois pas que le dollar puisse être détrôné par l’euro, l’or ou le yuan. Même contesté, le dollar restera la devise de réserve de la plupart des banques centrales. La Livre Sterling a été la devise de référence mondiale pendant la première partie du  XXème siècle mais n’a pas disparu des paniers de réserve des banques centrales avec la fin de l’Empire britannique.

C'est toujours une devise importante dans les dans les paniers de réserve des banques centrales, certes beaucoup moins qu'elle ne l'était à l'époque, mais c'est une devise qui est 4 à 5 fois plus importante que le PIB.du Royaume-Uni ne le justifie dans les réserves des grandes banques centrales internationales. Un statut de devise de référence ne s’effrite que sur le très long terme.

 

Ecrit le 27 Juin 2025

1 Source : Natixis Investment Managers, Global Survey of Individual Investors, réalisée par CoreData Research en février et mars 2025. L'enquête a porté sur 7 050 investisseurs individuels dans 21 pays

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