Les normes comptables IFRS9 pourraient avoir un impact majeur sur le résultat des banques, assureurs et entreprises cotées.

Points clés

  • La norme comptable IFRS 9 modifie la classification et la comptabilisation des instruments financiers. Le changement de traitement comptable pourrait se traduire par une volatilité accrue du compte de résultat.
  • Le choix de l’enveloppe de détention pour un instrument (fonds ouvert ou détention en direct) impactera directement le résultat.
  • Les conséquences financières, informatiques et organisationnelles sont importantes pour les acteurs dont les investissements représentent une part importante de leur bilan, notamment les assureurs et certaines grandes entreprises. Pour les assureurs, ce chantier se superpose à celui sur la norme IFRS17.
C’est en juillet 2014 que l’IASB (International Accounting Standard Board) a finalisé la norme comptable IFRS 9, qui a depuis été adoptée par la Commission européenne (novembre 2016). Cette norme sera applicable au 1er janvier 2018 aux entreprises européennes cotées en Bourse mais aussi plus largement à celles faisant appel à l’épargne publique. C’est notamment le cas des grands émetteurs obligataires corporate et des banques. Tous les assureurs qui publient leurs comptes en IFRS, qu’ils soient cotés, filiales de groupes bancaires ou pas, pourraient en reporter l’application à 20211.

Qu’est-ce qui change entre IAS 39 et IFRS9 ?
IFRS 9 est structuré en plusieurs phases dont les deux premières sont les plus importantes : la phase 1 concerne le classement des actifs financiers en fonction de leur nature et de l’intention de détention ; la phase 2 traite de la dépréciation.

IFRS 9 modifie la classification et la comptabilisation des instruments financiers. Les catégories d’instruments sont revues ainsi que les intentions de détention. En particulier, l’ancien classement Hold To Maturity (HTM) potentiellement très pénalisant en cas de vente disparait. La catégorie Available For Sale (AFS) disparait elle aussi, avec une conséquence très importante : il n’y a plus de plus- ou moins-values latentes sur OPCVM donc plus de pilotage de résultat possible par la vente de ces instruments. Ce changement de norme comptable- de IAS 39 à IFRS 9 - pourrait sembler anodin mais son impact sur le résultat peut être très important : en effet, le traitement comptable d’un investissement conditionne fortement son impact sur le résultat, la vision sur sa rentabilité et donc son opportunité.

Quelle conséquence des nouvelles classifications comptables pour les investisseurs
Une conséquence attendue est la probable hausse de la volatilité du compte de résultat. Cela découle directement du classement des actifs détenus. Auparavant, les actions, obligations et OPCVM pouvaient être comptabilisés en Juste Valeur par Autres Eléments du Résultat Global (en anglais FVOCI pour Fair Value Through Other Comprehensive Income). Pour résumer simplement, l’écart entre la valeur comptable historique (amortie) et la valeur de marché d’un actif était inscrite au bilan, mais pas en résultat. Une vente permettait de « recycler » en résultat cet écart de valeur « latent ». Avec IFRS 9, pour qu’un actif ait accès à ce mode de comptabilisation, il faut, d’une part, une intention de détention relativement longue et, d’autre part, que les flux de l’instrument financier « correspondent uniquement à des remboursements de principal et à des versements d’intérêts sur le principal restant dû ». L’acronyme anglophone correspondant est SPPI (pour Solely Payment of Principal and Interest) et on parle d’instrument qui passe le test SPPI. Exit donc les actions, les OPCVM et les obligations trop complexes ou contenant des clauses optionnelles trop importantes. Pour tous ces instruments, ce sera la juste valeur par résultat autrement nommée « Full Fair Value » : plus de latent, toute variation de valeur de l’instrument figure directement dans le compte de résultat.

Existe-il une échappatoire ?
Il existe une option permettant de ne pas passer en résultat pour les instruments dits de capitaux propres dont la valorisation de marché est volatile, c’est le cas des actions. Les variations de valeur peuvent alors être comptabilisées en FVOCI. Mais cette option a une contrepartie très forte : l’absence de recyclage en résultat. La variation de valeur de l’instrument n’affecte plus le résultat, mais l’éventuelle plus-value réalisée sur l’instrument lors de sa vente non plus.

Étonnamment, un même actif avec la même intention de détention n’aura pas les mêmes impacts comptables suivant qu’il sera détenu en direct ou par l’intermédiaire d’un fonds ! Par exemple, pour des obligations qui passent le test SPPI, en cas de détention en direct (mandat), l’investisseur aura le choix entre une comptabilisation au coût amorti ou en FVOCI avec recyclage ou même en Full Fair Value. C’est à dire le choix entre une comptabilisation hors bilan, au bilan ou au compte de résultat de sa plus ou moins-value latente. Le mode de détention importe. Si ces mêmes actifs sont détenus via un fonds, la comptabilisation en juste valeur par résultat s’imposera. Quant à des instruments comme les actions, si l’investisseur les détient en direct, il pourra avoir recours à l’option dérogatoire pour les classifier en « autres éléments résultats global » sans impact sur le résultat, mais il n’aura pas cette option si elles sont détenues via un fonds. Autrement dit : l’enveloppe a un impact sur les choix de comptabilisation, et donc sur l’impact sur le résultat !

Qu’en est-il de la dépréciation ?
La dépréciation ne concerne plus que les titres qui passent le test SPPI et pour lesquels le choix est fait de ne pas les comptabiliser en Juste Valeur Par Résultat. Pour les autres, toute variation de valeur est soit automatiquement passée en résultat soit elle n’y passera jamais. Il n’y a donc pas lieu de déprécier, c’est-à-dire de forcer la constatation d’une perte en résultat.

Le changement de modèle est extrêmement structurant. Auparavant, on attendait de constater un événement de crédit ou une probabilité quasi certaine de défaut avant de déprécier le titre. Il s’agissait d’une dévalorisation ex post. Dorénavant, il faudra provisionner dès l’achat (ex ante) en fonction de la probabilité de défaut (pertes attendues à 1 an). Puis, en fonction de l’évolution du risque sur le titre, cette dépréciation sera augmentée, on provisionnera les pertes attendues à maturité. Les investisseurs vont ainsi devoir adopter un modèle proche de celui qu’utilise le contrôle des risques des banques pour le suivi de leur portefeuille de crédit. Les entités Risques des banques sont donc déjà familières d’une telle approche, mais, pour les assureurs, ce sera un chantier important en termes de modification des systèmes d’informations et des écritures comptables.

Pourquoi pour les assureurs en particulier ?
Les conséquences sont particulièrement importantes pour les banques et les assurances car la part de détention de ces actifs sur leur bilan est particulièrement importante. C’est potentiellement moins le cas pour les grands corporates, tout dépend dans leur cas de la taille de leur portefeuille d’investissement (par exemple pour couvrir des passifs sociaux) impacté par ces normes comptables relativement à la taille de leur bilan.

La norme IFRS 9 a déjà modifié la façon de stocker, de gérer et d’utiliser l’information comptable. Elle a nécessité donc des évolutions logicielles et il peut s’agir de chantiers représentant plusieurs centaines, voire des milliers de jours hommes. Pour les assureurs en particulier, cela se superpose avec le chantier sur la norme IFRS 17 touchant à la comptabilisation même des contrats d’assurance. C’est donc assez logiquement que tous les assureurs, que ce soit ou non leur activité principale, pourraient obtenir un report- de l’application d’IFRS 9 à 2021 la date de mise en œuvre prévue de la nouvelle norme sur la comptabilisation des contrats d’assurance (IFRS 17 auparavant nommée phase 2 de IFRS4).1
1 A la date de rédaction de l’article, l’amendement, prévu dans le Draft D051300/02, précisant la possibilité de report étendue à tous les assureurs n’avait pas encore été publié au Journal Officiel de l’Union Européenne.

Publié en Décembre 2017

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