La transformation numérique des infrastructures est une réponse aux incertitudes créées par la crise de la COVID-19 et ses conséquences.

Points clés

  • Les infrastructures en tant qu’investissement étaient en pleine mutation avant que la pandémie ne frappe, et cette crise est susceptible de jouer un rôle de catalyseur pour accélérer la transformation numérique de ce secteur
  • En collaboration avec le cabinet de conseil en stratégie Altermind, Vauban a lancé une étude destinée à analyser et à anticiper les grandes tendances de long terme. Cette crise est susceptible de déboucher sur quatre scénarios économiques différents (le chaos, la décroissance, de nouvelles « années folles », un New Deal vert)
  • Les infrastructures 4.0, qui font écho à l’« industrie 4.0 », visent à adopter la technologie de la 4e révolution industrielle à toutes les étapes du cycle de vie des infrastructures en introduisant de nouveaux processus numériques, en favorisant leur résilience et leur capacité à se développer
À l’avenir, les villes auront de plus en plus besoin de services innovants pour optimiser la gestion de toute une série de fonctions, notamment le stationnement, l’éclairage, la circulation, la gestion des déchets et les services d’urgence, afin de réaliser des économies, d’améliorer l’efficacité, la sécurité et la qualité de vie des habitants.

Investir dans les infrastructures signifie investir dans des actifs qui ont prouvé historiquement leur résilience. Mais face au saut technologique actuel, qui placera la connectivité au cœur de nos économies, il faudra composer avec une 4e révolution industrielle fondée sur la numérisation. Investir dans les infrastructures nécessitera de sélectionner celles capables de rester à l’avant-garde en fournissant de manière résiliente des services essentiels aux communautés pendant plusieurs générations, dans la mesure où les besoins de ces communautés évolueront rapidement et en conséquence.

Conserver une approche d’investissement passéiste implique désormais de s’exposer à un risque important. Les infrastructures en tant qu’investissement étaient déjà en train de muter avant que la pandémie ne frappe. Après la pandémie, les changements seront vraisemblablement de nature à provoquer de véritables transformations.

Il est impossible de prévoir les chemins exacts qu’empruntera le changement, ce qui signifie que nous entrons dans une ère de grande incertitude, comme l’explique un livre blanc réalisé par Vauban Infrastructure Partners. Ce document1, intitulé The Era of Infrastructure 4.0, présente quatre scénarios macroéconomiques plausibles pour le monde qui émergera de la COVID-19, et propose une réponse à ces scénarios qui peut être adoptée par les investisseurs en infrastructures.

De puissantes forces sont à l’œuvre
« Soyons clairs, la pandémie n’est pas le principal responsable de l’évolution du paysage des infrastructures, elle va néanmoins accélérer le processus historique qui était déjà à l’œuvre », déclare Gwenola Chambon, directrice générale de Vauban Infrastructure Partners. « Trois grands facteurs de transition se sont combinés au cours de la dernière décennie ».

 Le premier, une transition sociétale et démographique, a vu l’émergence d’une génération dite digital-native, avec des trajectoires de vie et professionnelles moins linéaires, et une tendance à se regrouper dans les villes avec un déclin notable de la classe moyenne partout. Le nombre croissant de personnes vivant dans les villes a créé un écart de développement spatial entre les zones rurales et urbaines. Parallèlement, à quelques exceptions près, la population mondiale a inexorablement vieilli. Tout cela crée de nouveaux besoins sur le plan des infrastructures.

Le deuxième est la transition écologique en cours, par laquelle les préoccupations relatives au changement climatique et aux risques environnementaux se manifestent partout et poussent les gouvernements et les entreprises à s’adapter pour atteindre leurs objectifs en matière d’émissions carbone et respecter des normes environnementales plus strictes.

Enfin, nous avons assisté à une transition technologique fulgurante, qui a permis d’améliorer progressivement les infrastructures grâce à l’utilisation de données et de l’intelligence artificielle.

La crise de la COVID-19 se produit donc à un moment où la combinaison de ces trois transitions est susceptible de générer une accélération majeure du changement qu’elles induisent. Avant cette crise, nous aurions pu nous demander : que se passe-t-il lorsque tout le monde travaille de chez lui et ne communique qu’à distance ? Que se passe-t-il lorsque l’enseignement des écoles, des universités, ou des services de santé entiers se font à distance ?

En temps normal, ni les gouvernements, ni les entreprises, ni les instances scolaires n’auraient accepté de mener des expériences à une aussi grande échelle ! Des décisions qui, en temps normal, auraient pu prendre des années de délibération ont été prises en quelques semaines afin de gérer cette pandémie tandis que la connectivité devenait le seul outil pour maintenir la cohésion sociale.

Maintenant que les conséquences de la pandémie se font sentir, il est devenu plus facile de concevoir les dégâts que le changement climatique pourrait nous causer. De ce fait, les questions ESG occupent une place de plus en plus importante dans les priorités de la population et des pouvoirs publics.

La COVID-19 devrait jouer un rôle de catalyseur pour les tendances à long terme qui avaient déjà commencé et qui seront encore accentuées dans les années à venir. Cela est particulièrement vrai pour les infrastructures qui procurent des équipements vitaux aux communautés et des services qui sous-tendent le développement économique.

La grande question est maintenant de savoir si ces bienfaits inattendus de la pandémie vont persister. Les répercussions politiques et financières de la COVID-19 ont été considérables et il reste à voir si les décideurs politiques réagissent de manière judicieuse et rationnelle.

Quatre scénarios de post-pandémie pour les infrastructures
Selon Vauban, l’un de ces quatre scénarios économiques prévaudra dans les années à venir. Il s’agit des scénarios suivants :

  • Le chaos
  • La décroissance
  • Les années folles
  • Un New Deal vert
Dans le scénario du chaos, le pire qui soit, on observe un repli vers le national, et la mise en place de politiques à court terme nuisibles entraîne de nouveaux chocs dans les domaines financier, sanitaire, social et environnemental. Les gouvernements se recentrent sur des intérêts étriqués et à court terme, ce qui freine l’innovation et favorise les solutions à faible coût. Les efforts déployés pour réduire l’utilisation des combustibles fossiles sont relâchés, ce qui nuit au développement des énergies renouvelables.

Dans le scénario de la décroissance, le monde passe à un modèle moins intensif en carbone et low tech. La sobriété devient le mot d’ordre dominant, un nouveau modèle agricole est mis en place et la priorité est donnée aux villes de taille moyenne et aux chaînes de production et de logistique plus courtes. Tandis que les pays de l’OCDE maintiennent à peu près le même niveau de vie, les progrès dans les pays en développement se ralentissent en raison de l’absence d’une coopération générale, ce qui augmente le risque de défaut des emprunteurs souverains.

Dans le scénario des années folles, un large consensus en faveur de la croissance relance l’économie et réduit le chômage à court terme, et la coopération internationale prévaut. On assiste à un retour rapide aux anciens modes de consommation, à la sauvegarde des secteurs traditionnels (automobile, transport aérien, tourisme) et à l’investissement dans les industries matures. L’économie se redresse rapidement et l’innovation est progressive, mais les coûts environnementaux explosent et les inégalités continuent de s’accroître.

Le scénario le plus positif est celui du New Deal vert, dans lequel le choc de la crise de la COVID-19 et la priorité qui s’ensuit accordée aux risques sanitaires et environnementaux encouragent la communauté internationale à s’attaquer simultanément aux enjeux à court et à long terme. Les « New Deals » verts prolifèrent, et les politiques publiques privilégient et optimisent les « co-bénéfices », tels que les impacts économiques, environnementaux et sanitaires.

Le New Deal vert exploite la puissance des données afin de créer des infrastructures plus efficaces telles que des réseaux intelligents, un haut débit plus rapide, des ponts plus solides et des autoroutes plus sûres. L’inclusion est un aspect essentiel du New Deal vert, et entraîne un important transfert de richesse.

Dans leur analyse, Altermind et Vauban ont tenté de déterminer les effets à long terme de la crise. Bien qu’il soit impossible de prévoir l’issue exacte de la crise sanitaire et économique, plusieurs scénarios pourraient se dessiner dans les années à venir.

La question est de savoir si la triple transition environnementale, technologique et sociétale qui a été identifiée s’inversera ou s’accélérera. Il est actuellement impossible de savoir quel scénario prévaudra.
 
Quelles conséquences pour les investisseurs ?
« Si cette pandémie a démontré quelque chose, c’est bien que le fait de se saisir d’une rupture est une opportunité alors que la laisser passer la transforme en menace », selon Gwenola Chambon. À long terme, l’importance des infrastructures numériques en tant que composante des infrastructures globales ne fera que croître et, en tant que gérante d’actifs, Gwenola Chambon est intimement convaincue qu’il est essentiel d’évaluer la résilience future des actifs au moment d’investir et, par la suite, de les gérer activement afin de renforcer en permanence leur capacité à fournir des services utiles et efficaces aux communautés.

Il s’agira là de la seule façon de préserver la résilience de nos infrastructures. Si l’on se penche sur les expériences passées, on constate que les infrastructures ont souvent évolué grâce à la technologie. Ainsi, certains des actifs d’infrastructure actuels ne faisaient tout simplement pas partie des possibilités offertes dans le passé, à l’image des infrastructures numériques il y a 15 ans, comme le souligne Gwenola Chambon. « La numérisation et le renforcement de la connectivité sont devenus des outils clefs pour assurer un engagement à long terme et préserver notre légitimité à exploiter des infrastructures qui devront rester essentielles de façon pérenne ».

La numérisation des infrastructures se caractérise par un recours massif aux technologies numériques, aux réseaux intelligents, aux actifs physiques, aux personnes et aux entreprises dans un écosystème intégré alimenté par les données. Les technologies numériques, les données et l’IA sont omniprésentes et, si elles sont gérées correctement, avec la gouvernance, les compétences et l’éthique appropriées, elles peuvent améliorer la résilience des actifs en rendant leur exploitation plus efficace et plus sûre, tout en ouvrant de nouvelles voies de croissance.

Comme l’a déclaré Agnès Pannier Runacher, ministre française de l’Industrie, aux participants de la conférence Vauban, la numérisation rapide des infrastructures pendant la COVID-19 va renforcer la valeur et l’attrait de cette classe d’actifs. « La robustesse des infrastructures est devenue une préoccupation majeure pour notre gouvernement et leur fiabilité a été prouvée pendant la crise. Les processus numériques sont passés à l’action pour soutenir les infrastructures et ils constitueront désormais une part importante du futur ».

En résumé, la numérisation offre aux investisseurs en infrastructures la possibilité de bénéficier du meilleur des deux mondes : une protection contre les risques de baisse des marchés et un potentiel de croissance.

Place à une nouvelle perspective
Pour pouvoir s’exposer au meilleur des deux mondes, il est nécessaire d’adopter une nouvelle perspective sur la manière de construire, de déployer et d’exploiter les infrastructures.

Les gérants d’infrastructures doivent désormais adopter une approche « holistique », qui tient compte non seulement des caractéristiques physiques des actifs d’infrastructure, mais aussi de la technologie qui y est intégrée. Comme l’a déclaré Ambroise Fayolle, vice-président de la BEI, aux participants à la conférence Vauban, « une meilleure intégration entre l’actif physique et les personnes qui l’exploitent présente un grand intérêt ».

La technologie embarquée s’applique à l’ensemble des actifs d’infrastructures, et en particulier aux infrastructures des villes denses. Le mobilier urbain tel que l’éclairage intelligent, les feux et les panneaux de signalisation, les abribus sont dé-silotés par la numérisation, et peuvent être considérés comme des actifs transversaux, recouvrant différentes fonctions et nécessitant la coopération de nombreux acteurs.

Les réseaux électriques intelligents intègrent des technologies numériques pour surveiller et gérer la distribution de l’électricité issue de différentes sources de production aux consommateurs finaux. Les réseaux intelligents sont les pierres angulaires de la transition énergétique, car ils facilitent l’intégration des énergies renouvelables dans le réseau électrique. Les réseaux intelligents offrent également des opportunités innovantes de collaboration entre les réseaux d’électricité, de gaz, de chauffage et de télécommunications.

Dans le domaine des transports, la numérisation permet de nouvelles solutions de mobilité telles que la mobilité électrique, les véhicules autonomes, le MaaS, la mobilité en accès partagé, etc. Les voitures individuelles ne disparaissent pas, mais les voitures électriques et autonomes dominent. Le télétravail et la livraison à domicile réduisent les embouteillages et favorisent une réorganisation plus efficace de l’espace urbain.
 
Un trajet « sûr » en bus ne fait plus seulement référence aux accidents ou à la criminalité, mais aussi à l’hygiène et à la santé. La numérisation va bouleverser le secteur en favorisant le déploiement de nouveaux procédés pour les véhicules partagés ou à l’entrée d’un terminal, tels que les scanners thermiques, les véhicules autonettoyants et les systèmes de paiement sans espèces.

La numérisation pourrait également bouleverser le secteur des infrastructures de santé. Les technologies de santé numériques amélioreront l’accès aux services de santé, augmenteront la qualité des soins et renforceront l’efficacité des systèmes de santé, grâce à la prévision des épidémies et à la prise de décisions.

Conclusion - le rôle déterminant de la numérisation
La plupart d’entre nous espèrent une économie plus durable après la pandémie. Pour Agnès Pannier Runacher, « nous devrions viser le scénario du New Deal vert ». « C’est de loin le plus souhaitable et nous emploierons tous les moyens pour y parvenir. »

Nombreux seront ceux à se faire l’écho de ses propos. Mais même si tout ne se passe pas aussi bien que nous le souhaiterions, les investisseurs conscients du rôle essentiel de la numérisation pourront se tourner vers des infrastructures plus efficaces et plus vertes, et en récolter les bénéfices.
1 Ce document, réalisé avec le cabinet de conseil Altermind, est le résultat de quatre ateliers avec des professionnels chevronnés du secteur des infrastructures. Il a été présenté lors d’une conférence virtuelle organisée par Vauban en décembre, au cours de laquelle la ministre française de l’Industrie et la Banque européenne d’investissement se sont félicitées des principales conclusions du document.

Publié en Mars 2021.

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