Pourquoi les régimes de retraite à cotisations définies devraient repenser leurs options par défaut ?

Points clés

  • Dans notre dernière enquête* menée auprès de plus de 60 régimes de retraite à cotisations définies (Defined contribution - DC) au Royaume-Uni, nous avons constaté que nombre d’entre eux possédaient les réserves de liquidités et la volonté nécessaires pour investir dans des actifs illiquides. Notre livre blanc intitulé “A Fetish for Liquidity” (« Les fétichistes de la liquidité ») offre une vision globale de la perception par les régimes DC britanniques des avantages des marchés privés.
  • Nous ajoutons également à un portefeuille DC un investissement dans une stratégie crédit multi-asset, composée de 50 % de prêts senior privés européens à effet de levier et de 50 % de titres de crédit cotés. Cette allocation réduit considérablement l’impact des tensions de marché, en faisant baisser la volatilité annualisée et en améliorant le ratio de Sharpe.
  • Les investisseurs ont besoin des performances à long terme des actions, mais aussi d’une volatilité plus faible lors des moments charnières qui les mènent à la retraite. Les régimes DC doivent s’efforcer de réduire au maximum la volatilité des actifs détenus par leurs adhérents, en investissant par exemple dans des titres de crédit privés et illiquides.
La pandémie de COVID-19 (un peu à l’image des nombreuses corrections historiques des marchés financiers) a remis au goût du jour l’impact négatif des actifs avec une liquidité quotidienne sur les portefeuilles des régimes à cotisations définies. Les fonds par défaut des régimes à cotisations définies sont sensiblement exposés aux actions et suivent inexorablement les phases de baisse des marchés. Pour les adhérents approchant de la retraite, la volatilité à court terme peut être très pénalisante.

Lorsque John Maynard Keynes a déclaré que « la liquidité des investissements qui profite à l’ensemble de la communauté, ça n’existe pas »1, il théorisait les périodes de ralentissement économique ou de récession. Dans ce type de contexte, la liquidité d’une multitude d’actifs peut s’évaporer du jour au lendemain en raison de la défiance entre les institutions. La liquidité disparaît lorsque les investisseurs se retirent du marché simultanément et l’obligation de liquidité quotidienne de certains instruments exacerbe le problème.

C’est pourquoi il existe des mécanismes pour ne pas pénaliser les investisseurs qui choisissent de rester investis : swing pricing, décotes entre des ETF obligataires et leurs indices sous-jacents et l’écartement marqué des spreads entre l’achat et la vente. Les actions cotées conservent une bonne liquidité, même si elles sont exposées à des corrections massives.

Face à la crise du COVID-19, on se rend compte de l’impact de la quête effrénée de liquidité des fonds par défaut des régimes de retraite à cotisations définies, qui sont fortement exposés aux marchés actions et répliquent donc leurs mouvements baissiers, sans que leur diversification ne les aide à atténuer la baisse de leur valeur. Pour les adhérents approchant de la retraite, la volatilité à court terme peut être très pénalisante. Investir sur le long terme est certes rémunérateur, mais au sein de chaque portefeuille, les adhérents ne cessent d’effectuer des retraits et des versements, puis finissent par prendre leur retraite. Tous n’ont pas le privilège de pouvoir conserver le même régime pendant 40 ans ou une fenêtre de 5 ans pour prendre leur retraite, de sorte que la volatilité peut fortement les pénaliser.

Réduire la volatilité grâce au crédit alternatif
Intéressons-nous à l’impact d’un investissement dans le crédit alternatif sur l’amélioration de l’efficience d’un portefeuille pendant les corrections de marché. Ajoutons à un portefeuille DC une couche de stratégie crédit multiassets, composée de 50 % de prêts senior privés européens à effet de levier et de 50 % de titres de crédit cotés. Nous évaluons l’impact d’un renforcement de l’exposition de 20 % et 40 % - de manière proportionnelle - sur un fonds par défaut composé de 85 % d’actions internationales et de 15 % de gilts.2

Le principal avantage de s’exposer a crédit alternatif dans un portefeuille DC est de réduire son profil de risque, sans affecter outre mesure les performances sur l’horizon d’investissement, ce qui accroît l’efficience du portefeuille. Cette allocation est en mesure de diminuer l’impact des épisodes de tension importants et prolongés. Entre 2002 et 2020, période marquée par la crise financière mondiale de 2008, la perte maximale est passée d’environ 27 % dans le portefeuille traditionnel à 23 % grâce à l’ajout d’une allocation de 20 % au crédit alternatif, et à 25 % en ajoutant une allocation de 40 % à des stratégies de crédit alternatif.

A partir du début de la crise (nov. 2007)3, un portefeuille assorti d’une exposition au crédit alternatif de 20 % à 40 % aurait permis aux adhérents des régimes d’effacer leurs pertes d’ici la fin 2009(+0,7 % avec une allocation de 20 % et+3,3 % avec une allocation de 40 %). En revanche, le portefeuille DC standard resterait dans le rouge (-2,12 %) fin 2009 et ne pourrait effacer ses pertes avant février 2010. Une allocation à ce type de stratégie de crédit alternatif aurait donc protégé le portefeuille contre une correction des marchés. Mais qu’en est-il de sa performance sur le long terme ? La performance globale est relativement similaire, mais sa composition est très différente ! Le portefeuille par défaut traditionnel (85 % - 15 %) affiche un potentiel haussier plus important, avec un ratio de participation à la hausse4 d’environ 86 % (vs 63 % et 76 %). En revanche, il souffre davantage en cas de chute des marchés, avec une participation à la baisse proche de 82 % (vs 53 % et 68%).

Une exposition aux titres de crédit alternatif permet également de réduire le risque global d’un portefeuille (sur la base de la volatilité annualisée), qui passe de 11,67 % à 9,97 % et 8,45 %. De plus, le portefeuille présente une performance ajustée du risque plus élevée, avec un ratio de Sharpe passant de 0,42 à 0,45 et 0,52. Le portefeuille avec une allocation au crédit alternatif aurait donc surperformé l’indice MSCI World5 sur 18 des 20 trimestres baissiers. Il aurait ainsi assuré une protection contre le risque de baisse tout en maintenant le niveau de performance global du fonds.

Les allocations traditionnelles exposent les adhérents des fonds DC à des pertes
Certains régimes de retraite DC ont été en mesure de proposer des fonds par défaut appropriés répondant aux besoins des adhérents les plus anciens, et ont ainsi réduit l’impact négatif sur les portefeuilles pendant les phases de baisse des marchés Néanmoins, notre enquête auprès des régimes de retraite britanniques6 a montré que nombre d’entre eux n’offrent à leur adhérents qu’une seule option par défaut, ce qui laisse supposer que ces derniers pourraient largement en pâtir (quelque soit leur style de vie ou leur date d’échéance) si les allocations par défaut des fonds ne sont pas modifiées.

Les investisseurs ont besoin des performances à long terme des marchés actions, mais avec une moindre volatilité. Les régimes de retraite à cotisations définies doivent accompagner leurs adhérents jusqu’à la retraite, mais en réduisant l’impact des fluctuations des marchés. C’est précisément ce qu’un investissement approprié sur les marchés des titres privés peut leur apporter.

Les régimes de retraite en quête d’actifs illiquides

  • Une enquête récente* menée auprès de plus de 60 régimes de retraite à cotisations définies (Défined contribution - DC) au Royaume- Uni, nous avons constaté que nombre d’entre eux possédaient les réserves de liquidités et la volonté nécessaires pour investir dans des actifs illiquides. Principales conclusions :
  • Les fiducies principales sont bien plus susceptibles d’investir dans des actifs illiquides à l’avenir que les régimes de retraite collectifs à cotisations définies (Group Personal Pensions - GPP) et autres fiducies. Sur une échelle de 1 à 10, où 1 correspond à une très faible probabilité et 10 à une certitude absolue, les fiducies principales établissent estiment à 7,4 leur probabilité d’investir dans des actifs illiquides, contre 4,2 pour les GPP et 4,6 pour les fiducies.
  • Interrogés sur le niveau approprié d’une allocation aux actifs illiquides, les fiducies principales l’estiment à 24,4 %, contre 25,6 % pour les GPP. Les régimes fiduciaires à cotisations définies anticipent pour leur part une allocation de 14,8 %.
  • La volonté des régimes de retraite DC, en particulier les fiducies principales, d’utiliser des actifs illiquides s’explique par le niveau de leurs liquidités. Selon notre enquête, les fiducies principales reçoivent chaque année des flux de trésorerie annuels représentant 30,2 % du total de leurs actifs, contre 12,6 % pour les GPP et 11,2 % pour les fiducies. La proportion des adhérents à des fiducies principales censés effectuer des sorties ou partir à la retraite lors des 12 prochains mois représente 4,4 % du total des membres actifs (contre 4,2 % pour les GPP et 5,5 % pour les fiducies).
  • Interrogés sur leurs besoins actuels et futurs en liquidités, le pourcentage moyen des actifs actuels devant être liquides a été estimé à 3,8 % actuellement, à 7 % d’ici cinq ans et à 14 % d’ici 10 ans, ce qui témoigne des échéances de certains régimes à promoteur unique. Compte tenu de leurs flux de trésorerie positifs et de la liquidité existante de la plupart des fonds, le niveau relativement modeste de liquidités nécessaire lors des cinq prochaines années montre que les régimes DC disposent de réserves largement suffisantes pour investir dans des actifs illiquides.
  • Les taux de cotisations salariales et patronales sont de 16,2 % pour les fiducies, de 13,2 % pour les GPP et de 13 % pour les fiducies principales. Ces niveaux ne sont pas surprenants. En effet, les régimes fiduciaires à cotisations définies ont souvent été mis en place par des employeurs très impliqués dans des plans de retraite professionnels , alors que les adhérents à des plans de retraite multi-employeurs sont plus susceptibles de recevoir des cotisations au taux obligatoire minimum dans le cadre du régime d’adhésion automatique (ou auto-enrolment), qui est actuellement de 8 % du total des cotisations).
La version intégrale du rapport est disponible ici
1 John Maynard Keynes, 1936, La théorie générale de l’emploi, de l’intérêt et de la monnaie.

2 L’étude a été menée entre janvier 2002 et mars 2020, en utilisant des observations mensuelles et des performances exprimées en GBP. Le fonds composé de titres de crédit cotés est exposé aux obligations internationales à haut rendement, Investment Grade et de la dette émergente. Les grands indices de marché font office de proxy pour toutes les classes d’actifs de l’étude. Rapport disponible sur demande.

3 Début des pertes du fonds DC par défaut représentatif composé de 85 % d’actions mondiales et 15 % de gilts.

4 Indice de référence : MSCI World NR USD.

5 Entre le 1er janvier 2002 et le 31 mars 2020.

6 Natixis Investment Managers, enquête auprès des régimes de retraite britanniques à cotisations définies sur leurs obligations en matière de liquidité. Enquête menée entre le 01/07/19 et le 31/07/19. L’enquête a été menée auprès de 65 régimes de retraite DC britanniques, représentant des fiducies (27), des fonds de pension collectifs (21) et des fiducies principales (17).

* Natixis Investment Managers, enquête auprès des régimes de retraite britanniques à cotisations définies sur leurs obligations en matière de liquidité. Enquête menée entre le 01/07/19 et le 31/07/19. L’enquête a été menée auprès de 65 régimes de retraite DC britanniques, représentant des fiducies (27), des fonds de pension collectifs (21) et des fiducies principales (17).

Publié en juin 2020

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